Régime cétogène et jeûne intermittent, bonne ou mauvaise idée ?

Publié le : 04/08/21
  • Il n’a pas fallu attendre le retour de l’été pour voir apparaître deux nouveaux régimes tendance : le jeûne intermittent et le régime cétogène. Nous avons soumis le sujet à deux experts en la matière, Michaël Sels, diététicien en chef à l'hôpital universitaire d'Anvers (UZA), et Kathleen Ervinckx, chef de l'équipe Nutrition & Tender.

    Selon une étude menée par Sciensano, l’institut scientifique belge de santé publique, 42 % des Belges ont pris du poids depuis le début de la crise sanitaire. Que nous ayons grossi pendant la pandémie n’est en somme pas étonnant. D’une part, les possibilités de pratiquer un sport en salle ont été quasi nulles pendant une année. D’autre part, le télétravail obligatoire a fortement réduit nos déplacements. La distance entre le bureau, le lit et la cuisine n’a jamais été aussi courte ! Sans oublier que nombre d’entre nous ont profité de cette période pour davantage cuisiner en famille ou se lancer dans la pâtisserie.

    42 % des Belges ont pris du poids depuis le début de la crise sanitaire.

    Le phénomène inquiète. Les problèmes de surpoids et l’obésité engendrent en effet des maladies cardio-vasculaires, du diabète et favorisent les cancers. En réponse, beaucoup sont tentés de faire régime. Et en ce moment, deux ont particulièrement la cote…

    Le régime cétogène mise sur… les lipides !

    Le régime cétogène, le premier des deux, va pourtant à l’encontre des recommandations de nutrition. En effet, si ce mode alimentaire fait la chasse aux glucides, il les compense par un riche apport en lipides !

    Une partie de ces graisses deviennent la principale source d’énergie du corps et sont transformées en corps cétoniques. Ces derniers, outre un effet coupe-faim, ont aussi une activité antioxydante et de protection des neurones. C’est d’ailleurs pour traiter l’épilepsie qu’il a été mis au point il y a plus de cent ans ! Mais pas pour maigrir… Dans ce régime, on peut manger de la viande, des fromages, de la charcuterie, des poissons gras, des corps gras (beurre et crème fraiche) mais on limite fortement les légumes et on ne consomme que des fruits pauvres en sucre (melon, pastèque, citron, etc.) et en très petites quantités (50 g par jour). Les autres fruits sont bannis.

    Le jeûne intermittent fait sauter un repas

    L’autre nouvelle « star » est le jeûne intermittent. Concrètement, il consiste à se priver de manger pendant 12 à 16 h. Dans la pratique, il s’agit donc de sauter un repas : le petit-déjeuner si l’on a mangé le soir, le repas du soir si l’on a petit-déjeuné ou pris un lunch. Aucun aliment n’est interdit pendant les deux repas de la journée. Selon les adeptes, il autorise un mode alimentaire équilibré (aucun aliment n’est interdit) et permet de perdre du poids à raison d’un kilo par semaine en moyenne.

    Mais la pratique doit être de courte durée, sous peine de carences à long terme ou de problèmes cardiaques.

    Une perte de poids peu saine

    Disons-le, suivre l’un ou l’autre de ces régimes n’est pas une bonne idée. Et pour cause : il s’apparente à une punition puisque dans les deux cas, la privation est au cœur du processus. Soit d’un repas complet, soit de glucides. Et pour les diététiciens et médecins, il ne s’agit clairement pas d’un moyen sain de perdre du poids.

    Photo Michaël Sels
    Michaël Sels

    « Clairement, ces régimes ne fonctionnent pas, confirme Michaël Sels, diététicien en chef à l’UZA, l’hôpital universitaire d’Anvers. Mon conseil : ne tombez pas dans le piège de ces soi-disant régimes miracles ou tendance. Le jeûne intermittent est, certes, très à la mode mais il fait tousser le moteur. La plupart du temps, il fait sauter le petit-déjeuner alors qu’il s’agit du repas le plus important de la journée. Alors oui, le surpoids et l’obésité sont un problème en Belgique. La moitié des Belges sont en surpoids. Et cette problématique touche aussi les jeunes enfants. D’après des chiffres de Kind en Gezin (l’ONE flamande, NDLR), 12% des enfants flamands âgés entre 2 et 4 ans sont en surpoids. Un pourcentage qui grandit chaque année. Mais il ne faut pas combattre ce fléau de n’importe quelle manière. »

    Manger sain plutôt que se priver

    Aux régimes, Michaël Sels, qui est aussi chef et animateur d’une émission de cuisine sur la chaîne télé Njam!, préfère un message positif : « Vous ne croyez pas qu’on nous a interdit suffisamment de choses aux cours de 15 derniers mois ? Alors pourquoi se priver de repas ou d’aliments quand on retrouve la liberté ? Commençons plutôt par manger plus de céréales complètes, de fruits et de légumes. Savez-vous que seuls 5% de Belges mangent suffisamment de légumes et que seuls 10% font de même avec les fruits ? Manger plus de fruits et de légumes est le premier pas vers une version de vous-même plus en forme et plus mince. Il n’est pas question de se priver de quoi que ce soit mais de s’alimenter de façon différente, plus qualitative et avec d’autres combinaisons. On ne se refuse rien et on se crée même de chouettes moments gourmands dans la journée. Car manger n’est pas qu’un besoin primaire, c’est aussi de la convivialité, des moments de partage en famille ou entre amis, bref se faire plaisir. Mais c’est vrai aussi, manger peut être une arme de destruction massive quand on fait n’importe quoi. Manger plus de légumes, par exemple, remplira l’assiette et, par ricochets, vous fera consommer moins de viande, moins de féculents et moins de glucides. »

    Participer à des challenges nutritionnels et sportifs

    Pour une meilleure alimentation et perdre du poids, notre diététicien conseille, notamment :

    • Un petit-déjeuner salé plutôt que sucré : du pain complet, du saumon fumé et des œufs plutôt qu’une tartine à la confiture. Vous éviterez les fringales, les fausses faims et les pics d’insuline.
    • Dire stop aux grandes portions de féculents le soir est un bon début.
    • Plus de légumes et de fruits. Notamment en favorisant les fruits déjà découpés, par exemple.

    « Il ne s’agit pas de se priver de quoi que ce soit mais de s’alimenter de façon différente, plus qualitative. »

    Photo Kathleen Ervinckx
    Kathleen Ervinckx

    « Chez Sodexo, nous avons remarqué que la consommation des fruits est en effet plus grande sur les sites dont le restaurant propose un bar à fruits avec des produits déjà découpés, plutôt que des fruits entiers dans une corbeille, confirme Kathleen Ervinckx, Teamleader Nutrition & Tender. Et cela fonctionne encore mieux si on combine ce bar à fruits à un bar à yaourts. Cette tendance, je la remarque aussi chez moi : mes enfants mangeront plus facilement des fruits si je les pèle d’abord. »

    Kathleen met aussi en avant le bienfait des challenges collectifs. « Devenir une version plus saine de soi-même et plus mince passe aussi par une modification des habitudes et par une augmentation de l’activité physique, poursuit-elle. Chez Sodexo, des challenges sportifs par équipes sont en cours, c’est très motivant. Le concept Mindful, que nous déployons sur nos sites depuis 2017, met en avant une alimentation saine sur un plan nutritionnel et diététique mais il intègre également une notion de bien-être qui passe par une activité physique plus importante. Les conseils et les challenges que nous proposons sur le site internet Mindful vont dans ce sens. »

    « Les challenges amènent des résultats très positifs, renchérit Michaël Sels. Le mois sans viande, le mois sans alcool, le mois sans se raser attirent beaucoup de gens. Et pourquoi pas un mois où l’on mangerait 300 g de légumes et 250g fruits par jour ? »

    Se faire accompagner

    Quoi qu’il en soit, avant de vous lancer dans un régime qui s’apparentera à une punition et qui n’est peut-être pas sans risque, mieux vaut consulter un diététicien qui appréhendera l’ensemble des problématiques.

    « Comme je le disais, il faut à tout prix éviter de suivre aveuglément une tendance, poursuit Michaël Sels. Un vrai suivi peut, dès lors, avoir du sens. Surtout pour éviter de faire n’importe quoi car, après tout, il y va de votre santé. Consulter un diététicien coûte plus cher qu’une visite chez le généraliste et n’est pas remboursé. C’est une démarche gouvernementale que je ne comprends pas. On connaît les dégâts de l’obésité mais on ne favorise pas la prévention. Une visite chez le diététicien n’est remboursée que dans des cas très rares comme les problèmes rénaux ou le diabète. C’est franchement regrettable. J’espère, dans un avenir proche, plus de soutien des gouvernements dans ce domaine. »

    « Un aval gouvernemental a toujours un impact important sur les comportements, reprend Kathleen Ervinckx. Je m’en suis rendu compte avec notre combat pour diminuer la consommation de sel et l’élaboration de notre Kit Sel soutenu par la Ligue Cardiologique Belge. »

    Live Michaël SelsSe laisser inspirer

    Dans son livre Lekker Lang Leven (disponible uniquement en néerlandais), Michaël Sels propose 50 recettes et donne les clefs pour vivre mieux et plus longtemps sans se priver ou suivre les nouveaux ayatollahs des régimes. Il fait de même dans son émission de télévision. Une façon ludique de faire passer des messages positifs.

    « Je mélange mes métiers de chef et de diététicien, dit-il. Comment faire pour bien manger ? Et surtout que ce soit un vrai plaisir ! Des plats délicieux et avec du goût. Je donne des clefs et des recettes. Dont quelques-unes, par exemple, pour manger des légumes au petit-déjeuner ou en dessert. »

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    « J’ai des retours très positifs de chefs Sodexo sur les émissions de Michaël, conclut Kathleen Ervinckx. C’est remarquable car diététicien et chef ne vont pas toujours de pair (rires). Mais c’est la preuve que, oui, on peut prendre beaucoup de plaisir en mangeant sainement. »

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